mardi 19 avril 2011

Inopportun appel de Dieu !…




Matthieu 21, 28 – 22, 14
28 Qu’en pensez-vous ? Un homme avait deux fils ; il s’adressa au premier et dit : Mon enfant, va travailler dans la vigne aujourd’hui.
29 Celui-ci répondit : « Je ne veux pas. » Plus tard, il fut pris de remords, et il y alla.
30 L’homme s’adressa alors au second et lui dit la même chose. Celui-ci répondit : « Bien sûr, maître. » Mais il n’y alla pas.
31 Lequel des deux a fait la volonté du père ? Ils répondirent : Le premier. Jésus leur dit : Amen, je vous le dis, les collecteurs des taxes et les prostituées vous devancent dans le royaume de Dieu.
32 Car Jean est venu à vous par la voie de la justice, et vous ne l’avez pas cru. Ce sont les collecteurs des taxes et les prostituées qui l’ont cru, et vous qui avez vu cela, vous n’avez pas eu de remords par la suite : vous ne l’avez pas cru davantage.

33 "Écoutez une autre parabole. Il y avait un propriétaire qui planta une vigne, l’entoura d’une clôture, y creusa un pressoir et bâtit une tour ; puis il la donna en fermage à des vignerons et partit en voyage.
34 Quand le temps des fruits approcha, il envoya ses serviteurs aux vignerons pour recevoir les fruits qui lui revenaient.
35 Mais les vignerons saisirent ces serviteurs ; l’un, ils le rouèrent de coups ; un autre, ils le tuèrent ; un autre, ils le lapidèrent.
36 Il envoya encore d’autres serviteurs, plus nombreux que les premiers ; ils les traitèrent de même.
37 Finalement, il leur envoya son fils, en se disant: Ils respecteront mon fils.
38 Mais les vignerons, voyant le fils, se dirent entre eux : C’est l’héritier. Venez ! Tuons-le et emparons-nous de l’héritage.
39 Ils se saisirent de lui, le jetèrent hors de la vigne et le tuèrent.
40 Eh bien ! lorsque viendra le maître de la vigne, que fera-t-il à ces vignerons-là ?"
41 Ils lui répondirent : "Il fera périr misérablement ces misérables, et il donnera la vigne en fermage à d’autres vignerons, qui lui remettront les fruits en temps voulu."
42 Jésus leur dit : "N’avez-vous jamais lu dans les Écritures : La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs, c’est elle qui est devenue la pierre angulaire ; c’est là l’œuvre du Seigneur: Quelle merveille à nos yeux. (Ps 118, 22-23 ; És 28, 16)
43 Aussi je vous le déclare : le Royaume de Dieu vous sera enlevé, et il sera donné à un peuple qui en produira les fruits.
44 Quiconque tombera sur cette pierre s’y brisera, et celui sur qui elle tombera, elle l’écrasera.
45 Après avoir entendu ses paraboles, les grands prêtres et les pharisiens comprirent que c’était d’eux qu’il parlait ;
46 ils cherchaient à le faire arrêter, mais ils eurent peur des foules, parce qu’elles le tenaient pour un prophète.

1 Et Jésus se remit à leur parler en paraboles:
2 "Il en va du Royaume des cieux comme d’un roi qui fit un festin de noces pour son fils.
3 Il envoya ses serviteurs appeler à la noce les invités. Mais eux ne voulaient pas venir.
4 Il envoya encore d’autres serviteurs chargés de dire aux invités: Voici, j’ai apprêté mon banquet; mes taureaux et mes bêtes grasses sont égorgés, tout est prêt, venez aux noces.
5 Mais eux, sans en tenir compte, s’en allèrent, l’un à son champ, l’autre à son commerce;
6 les autres, saisissant les serviteurs, les maltraitèrent et les tuèrent.
7 Le roi se mit en colère; il envoya ses troupes, fit périr ces assassins et incendia leur ville.
8 Alors il dit à ses serviteurs: La noce est prête, mais les invités n’en étaient pas dignes.
9 Allez donc aux places d’où partent les chemins et convoquez à la noce tous ceux que vous trouverez.
10 Ces serviteurs s’en allèrent par les chemins et rassemblèrent tous ceux qu’ils trouvèrent, mauvais et bons. Et la salle de noce fut remplie de convives.
11 Entré pour regarder les convives, le roi aperçut là un homme qui ne portait pas de vêtement de noce.
12 Mon ami, lui dit-il, comment es-tu entré ici sans avoir de vêtement de noce? Celui-ci resta muet.
13 Alors le roi dit aux servants: Jetez-le, pieds et poings liés, dans les ténèbres du dehors: là seront les pleurs et les grincements de dents.
14 Certes, la multitude est appelée, mais peu sont élus."

*

Qui sont les deux fils de la première parabole, les vignerons indignes de la seconde, ou les invités rétifs de la troisième ? Serait-on dans la tristement célèbre théologie de la substitution de l’Église à Israël — comme on l’a pensé si souvent à travers l’histoire —, avec un fils désobéissant qui figurerait un Israël rétif, et un fils comme Église qui obéit !? Théologie débouchant à terme sur des violences antisémites. N’est-ce pas en effet l’impression que peuvent donner ces textes de Mathieu ? Et notamment la parabole de la vigne donnée à d’autres vignerons !

Théologie aux fruits redoutables, sans compter que croire que ces paraboles sont contre les juifs n’est rien d’autre qu’une façon commode de se débarrasser de ces paraboles… pour finir par se comporter exactement selon la façon que Jésus dénonce, des façons d’assassins !

Ceux qui cherchent à arrêter Jésus, à la veille de son procès, sont les divers responsables, de toutes les nations, dont la puissance de communication — la puissance médiatique — finissent par convaincre le peuple. Ils font cela conformément à une habitude qui n’est pas nouvelle contre les porte-parole que Dieu envoie — pas plus en Israël qu’ailleurs. Et qui correspond à une manie universelle de rejeter et de tenter de faire taire ceux dont le message dérange.

*

Les satisfaits de ce monde n’ont rien à faire du don de Dieu — qui toujours dérange —, quelle que soit leur pratique ou non-pratique religieuse, de quelque tradition que ce soit en ce monde, qui succombe sous la violence. Guerre civile, catastrophe humanitaire, violence terroriste ? En tout cas, dans nos paraboles, cela finit très mal, jusqu’à des assassinats dans deux de nos paraboles. Mais, oh ! nous autres n’avons pas assassiné de messagers de Dieu ! Certes… Cela dit, ne sommes nous pas un peu trop occupés, « l’un à son champ, l’autre à son commerce » comme dit Jésus, ou encore à son affaire, — affaire qui vaut quoi finalement… ? Cela jusqu’à trouver inopportun l’appel de Dieu.

Alors son invitation pourrait très bien s’adresser à d’autres, épinglés sur les barrières de notre abondance de biens très palpables, de nourriture, de consommation, mais aussi de biens spirituels.

*

Car, que ce soit ceux qui refusent l’invitation au Royaume, voire qui persécutent, jusqu’à tuer, ceux qui la leur apportent ! — ou que ce soit ceux qui prétendent y entrer par leurs propres moyens, — on n’entre pas aisément dans le Royaume de Dieu.

Ce que confirme la deuxième partie de la parabole des invités au repas de noces !…

L’invitation vaut pour les méchants comme pour les bons… Des méchants et des bons, à savoir par la grâce seule : la grâce seule qui ouvre la conversion (le fils obéissant n’est il pas celui qui a commencé par dire : non !) — conversion signifiée par le revêtement de l’habit de noces. Il ne s’agit de n’être pas revêtu de ses propres prétentions…

*

Car c’est de cela qu’il s’agit au fond. C’est le deuxième aspect de la parabole des invités aux noces : parmi ceux qui viennent finalement au banquet — ceux auxquels s’est finalement adressé l’appel dédaigné par les repus de biens en tout genre —, voilà un de ces pauvres, apparemment, qui ne porte pas de vêtements de noce. Qu’est-ce à dire ?

Cela rappelle nos anciens qui parlaient d’habits du dimanche. Oh, je sais bien que Dieu regarde le cœur — mais comme dit Saint-Exupéry par la bouche du renard attendant le petit Prince : avoir des rites, des heures de rendez-vous pour pouvoir savoir à quel moment s’habiller le cœur, n’est pas si insensé. Et c’est probablement ce que voulait signifier le symbole du costume du dimanche.

S’habiller le cœur ! Et bien, ce que reproche le maître du festin de la parabole à l’homme trouvé sans habit de noces, c’est probablement d’avoir négligé, précisément, de s’habiller le cœur. Ce qui revient alors à dire que s’il n’a pas refusé de venir à cette invitation de dernière minute que les privilégiés ont négligée auparavant, il n’en a, pas plus qu’eux, mesuré la portée.

Sa tenue montre qu’il n’a pas perçu tout l’honneur que valait la fête du Royaume. Il ne s’est pas habillé le cœur ! C’est ce que trahit la parole finale sur les appelés et les élus. L’appel extérieur du messager n’a pas résonné en son cœur…

Lorsque l’appel de Dieu produit son effet, et à terme l’obéissance, c’est qu’il a résonné en moi au point finalement de produire une obéissance sincère.

Est-ce que l’invitation de Dieu à la fête de son Royaume résonne suffisamment en moi, me séduit suffisamment, pour qu’elle vaille que je quitte tout pour cela, que j’habille mon cœur de joie ; ou ai-je mieux à faire, est-ce que les messagers que dérangent à ce point, est-ce que je ne viens qu’à contrecœur, sans m’habiller le cœur ? Suis-je élu, choisi pour la fête, pour avoir entendu cet appel ? Ou est-ce pour moi chose indifférente ?

Si nous avons dédaigné l’appel qui ne cesse de retentir, aujourd’hui encore, il est toujours temps, maintenant, de faire retour, et de s’habiller le cœur pour la fête du Royaume.

R.P.
CP Antibes, 19.04.11


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